Un prêtre européen vivant de longue date à Jérusalem utilise une formule frappante lorsque des visiteurs s’étonnent de la présence de chrétiens au Proche-Orient : « On me demande comment ces Arabes sont devenus chrétiens. Je réponds qu’il faut plutôt se demander comment ces chrétiens sont devenus arabes. » Derrière ces mots, il y a l’expression d’une vérité simple : les communautés chrétiennes étaient présentes dans cette région du monde bien avant qu’elle ne soit conquise au VIIe  siècle par les forces arabes et musulmanes. Elles sont chez elles sur ce que l’on nomme trop facilement « terre d’islam ».

Dans les événements tragiques que traversent actuellement la Syrie, l’Égypte ou l’Irak, les communautés chrétiennes endurent en quelque sorte une triple peine. Elles partagent le sort de tous face à la violence des combats et des attentats. Mais, en outre, elles se voient dénier la qualité de citoyens par les extrémistes pour qui être syrien ou égyptien signifie être musulman. Enfin, elles sont critiquées, y compris en Europe, pour leur refus de s’engager contre le régime Assad en Syrie ou le pouvoir militaire en Égypte.

De fait, ces régimes – tout comme hier celui de Saddam Hussein en Irak – apparaissent à de nombreux chrétiens de ces pays comme un mal moindre que celui de pouvoirs islamistes. Mais là n’est pas la seule explication des nombreux appels à la concorde nationale lancés par les responsables des Églises chrétiennes de ces pays. C’est aussi en raison de la conviction qu’il n’y aura pas de paix durable si un camp en écrase un autre. C’est ce qu’ont voulu dire hier le pape François et le roi Abdallah de Jordanie en affirmant que « la voie du dialogue et de la négociation entre toutes les composantes de la société syrienne, avec l’appui de la communauté internationale, est l’unique option pour mettre fin au conflit et aux violences qui provoquent chaque jour la perte de nombreuses vies humaines, surtout parmi la population sans défense ». De cette phrase, il faut retenir quelques mots. Le dialogue est « l’unique option ». Quant à la communauté internationale, on attend d’elle un « appui » et non des frappes.

29/08/20123

Guillaume Goubert

La Croix