FRANCE 24. 02/06/2016

Les 630 députés du Bundestag ont adopté jeudi une résolution parlementaire reconnaissant le génocide des Arméniens par les forces ottomanes en 1915. Cette résolution risque de détériorer les relations entre l'Allemagne et la Turquie.

Le Bundestag, la chambre basse du Parlement allemand, a voté jeudi 2 juin à une majorité écrasante une résolution reconnaissant le génocide des Arméniens par les forces ottomanes en 1915.

Un texte vivement combattu par Ankara.Seul un député a voté contre et un autre s'est abstenu lors du vote, a annoncé le président de la chambre basse, le

Merkel absente lors vote
Dans le texte intitulé "Souvenir et commémoration du génocide des Arméniens et d'autres minorités chrétiennes il y a 101 ans", le Bundestag "déplore les actes commis par le gouvernement Jeunes Turcs de l'époque, qui ont conduit à l'extermination quasi totale des Arméniens". Il reconnaît aussi "le rôle déplorable du Reich allemand qui, en tant que principal allié militaire de l'empire ottoman (...) n'a rien entrepris pour stopper ce crime contre l'Humanité".

"Le sort des Arméniens est exemplaire dans l'histoire des exterminations de masse, du nettoyage ethnique, des déportations, et oui, des génocides qui ont marqué le XXe siècle de terrible façon", lit-on dans le texte de la déclaration.

Côté gouvernement allemand, Angela Merkel n'a pas participé au voteen raison d'autres obligations, mais elle a soutenu le texte lors d'un scrutin test mardi au sein du groupe parlementaire conservateur, selon une porte-parole, Christiane Wirtz.

Toujours est-il que le moment du vote de cette résolution est malvenu pour la chancelière, qui joue son avenir politique sur l'accord conclu en mars avec la Turquie par lequel Ankara a accepté d'endiguer le flot de migrants arrivant en Europe en échange d'avantages divers, en matière de visas notamment, et de l'accélération des discussions sur l'entrée de la Turquie dans l'UE.

Ankara hausse le ton et menace
Et sans surprise, la Turquie, qui estime que la mort de 1,5 million d'Arméniens en 1915-1916 sur son territoire actuel "n'est pas un génocide", a haussé le ton contre l’Allemagne, où vit une importante communauté turque. Mardi, le président Recep Tayyip Erdogan a téléphoné à la chancelière Angela Merkel pour lui faire part de ses "inquiétudes" et souligner que "ce piège" pourrait "détériorer toutes nos relations avec l'Allemagne". Mercredi, son Premier ministre, Binali Yildirim, a estimé que le vote constituera "un véritable test de l'amitié" entre Ankara et Berlin.

Les remous causés par la résolution inquiètent cependant jusque dans les rangs du gouvernement allemand. Le ministre des Affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier, a déjà exprimé des réserves et son porte-parole a dit "espérer" qu'il ne causera pas de "perturbation durable des relations avec la Turquie".

Dans une interview au quotidien allemand Bild mercredi, le président arménien Serge Sarkissian a lui encouragé les députés allemands à ne pas se laisser "intimider" par la Turquie.
"Ce ne serait pas juste de ne pas nommer génocide le génocide des Arméniens uniquement parce que cela met en colère le chef d'Etat d'un autre pays", a déclaré M. Sarkissian, en référence au président turc. Selon lui, l'accord sur les migrants conclu avec l'Union européenne, sera de toute façon "difficile à appliquer dans la durée avec un partenaire comme la Turquie".

L'an dernier, quand l'Autriche a voté une déclaration de reconnaissance du génocide arménien, la Turquie a rappelé son ambassadeur à Vienne et évoqué "des effets négatifs permanents" dans les relations diplomatiques entre les deux pays.
Plus de 20 pays, dont la France par la loi du 29 janvier 2001, ont reconnu le génocide des Arméniens, suscitant la colère de la Turquie, qui nie toujours l'organisation d'une campagne pour leur élimination systématique.
Avec AFP et Reuters