RTBF – Par Fabien Van Eeckhaut – 7 juillet 2015
On va reparler "génocide arménien" ce mardi à la Chambre. En 1998, le Sénat avait déjà adopté une résolution reconnaissant le génocide et invitant le gouvernement à faire de même. En cette année 2015, 100 ans après les massacres, le débat va démarrer ce matin 10h en commission des Relations extérieures sur pas moins de 4 propositions de résolution, visant à la reconnaissance officielle par la Belgique (parlement et gouvernement) du génocide arménien.
Propositions émanant de la majorité, mais aussi du CDH, du PS et du Vlaams Belang. 4 textes car chacun dans ce dossier redevenu soudain sensible compte bien faire entendre ses propres accents.
Mais c'est le Premier Ministre lui-même qui aura beaucoup contribué à remettre le débat à l'agenda. Le 18 juin, interrogé par un député de sa majorité, Charles Michel, à la tribune de la Chambre, donne l'ultime coup d'accélérateur. " Je veux être très clair, ma position est connue et sans équivoque: j’estime que les événements tragiques survenus entre 1915 et 1917, et dont le dernier gouvernement de l’Empire ottoman est responsable, doivent être qualifiés de génocide. Telle est la position du gouvernement belge". Des propos retentissants qui lui attirent les applaudissements de tous, y compris côté opposition.
Un long chemin vers la reconnaissance
Et c'est vrai que le débat pour une reconnaissance semblait s'enliser. Le 26 mars 1998, une résolution adoptée par le Sénat (par 49 voix pour et 9 abstentions) reconnaissait le génocide arménien. Mais cette résolution ne demandait pas formellement au gouvernement belge de le reconnaître officiellement au nom de la Belgique. 2015, 100 ans du génocide oblige, la majorité avait promis un texte rapidement mais de texte, jusqu'à la déclaration solennelle du Premier ministre, il n'y avait pas encore. Alors que dans le même temps, le 22 avril 2015, le Parlement flamand avait pour sa part adopté déjà sa résolution reconnaissant le génocide arménien. Le ministre des Affaires étrangères MR Didier Reynders semblait vouloir d'ailleurs rester bien plus prudent et l'on évoquait une volonté de ne pas crisper Ankara à l'approche d'un Europalia Turquie...
Retour à la Chambre
La balle est donc revenue côté Parlement. Avec pas moins de 4 propositions de résolutions à étudier dès ce matin 10h en commission des Relations extérieures. La majorité (N-VA, MR, CD&V, Open VLD) a donc fini par accoucher de son texte tant annoncé, optant pour une inscription et une discussion en urgence - la volonté est de le faire adopter en plénière de la Chambre d'ici la trêve estivale, 21 ou 23 juillet. Mais le CDH, le PS et même le Vlaams Belang ont sorti leur propre moûture.
Le texte le plus court étant celui du Belang, datant de septembre 2014, sans dérapage extrême, appelant "le gouvernement à reconnaître le génocide" et à "inciter la Turquie à faire de même", pour la justice et la réconciliation entre les peuples turc et arménien.
Ce que mentionne aussi la proposition de résolution de la majorité consacrée je cite "à la commémoration du centenaire du génocide", reprenant les propos très clairs du Premier ministre Charles Michel à la Chambre. Sauf que l'on s'interroge sur ce premièrement disant que la "Turquie actuelle ne saurait être tenue pour responsable du drame vécu par les Arméniens de l'Empire ottoman". "Trop prudent, trop léger, étrange de mentionner cela en premier point" estime le CDH Georges Dallemagne qui y va aussi de sa résolution, plus ferme, moins ambigue selon lui, et de demander "une indispensable clarté des autorités belges" et un engagement très ferme du gouvernement à faire pression sur la Turquie.
Les séquelles des "affaires" Ozdemir et Kir
Le CDH qui a choisi la ligne dure après l'exclusion très médiatique pour non-reconnaisance du génocide de sa députée bruxelloise Mahinur Ozdemir. 4ème et dernier texte, celui du PS, cosigné notamment par la députée carolo Ozlem Ozen, le PS qui devait clarifier sa propre ligne après les hésitations autour des minutes de silence d'hommage aux victimes au parlement bruxellois et fédéral, et l'absence de certains élus tels Emir Kir, depuis mollement rappelé à l'ordre. Le PS qui parle bien de "génocide" arménien mais estime que "le parlement n'a pas vocation à se subsituer au pouvoir judiciaire" et appelle les instances internationales à se prononcer juridiquement sur le sujet.
Reste à voir comment se positionneront le Sp.a, Ecolo-Groen ou encore le FDF qui, le mois dernier, avaient choisi de soutenir les amendements que le CDH avait déposé face à la motion de la majorité. Autant d'accents parfois différents pour une même reconnaissance qui devraient à nouveau se faire entendre dans le débat ce matin en commission des relations extérieures.