Rtl.fr - Par Isabelle Morini-Bosc - 29/11
Edito. La journaliste ironise sur la polémique qui a agité internet après l'apparition de Valérie Boyer à la télévision avec une croix arménienne. C'est peu de dire qu'elle porte sa croix, la députée Valérie Boyer, qui a vu sa côte de notoriété exploser.
Non, non, on ne parle pas là de popularité, mais bien de notoriété. Qui connaissait en effet jusqu'à dimanche cette jolie quinqua à la frémissante frimousse, porte-parole de François Fillon ? Dans le grand public, personne. Tout au plus certains se souvenaient-ils de quelques apparitions fugaces, furtives, comme le furet passant par ici et repassant par là au gré des besoins de son "gagnant de la primaire". Une primaire qui lui vaut justement aujourd'hui quelques effets secondaires. Car brusquement, la voilà partout.
Près de son François Ier, forcément, mais aussi surtout sur les réseaux sociaux. Et pourquoi donc ? S'est-elle fait remarquer par des propos fielleux, mielleux ? Par une boutade faite à Dijon (une boutade de Dijon, en somme), par une gaffe faite... Sans justement faire gaffe ? Non, même pas. Si tous connaissent aujourd'hui le matricule de cette élue, c'est uniquement parce qu'elle portait dimanche une petite chaîne complétée par une toute petite croix visible à la télévision. D'où un incroyable tollé. Comment osait-elle ? Oui, comment osait-elle saccager à elle toute seule la République et sa loi sur la laïcité ? Et tant pis si cette loi n'a jamais interdit de porter la médaille traditionnelle de son baptême ou de sa confirmation.
Où est-il, ce temps pas si lointain où mes copines portaient nonchalamment, qui une médaille de la vierge -doux Jésus -, qui une étoile de David, qui une main de Fatma... Sans que cela pose quelques problèmes que ce soit. Mais ce qui laisse notre députée Valérie dépitée, c'est qu'elle n'est de surcroît pas plus catholique que je suis moi avaleuse de sabres au Cirque d'hiver. Il s'agit en effet d'une croix arménienne, symbole d'un peuple jadis massacré par les Turcs. Cela n'a pas empêché de (trop) nombreux internautes de brandir l'accusation d'islamophobie, et d'insulter des "catholiques par définition intégristes".
Mettrait-on encore de nos jours les gens en croix, qu'elle y aurait droit. Qu'ajouter ? Ben rien. À partir du moment où un bijou que l'on porte par amour sur une robe ou sous un habit (qui fait manifestement le moine !) est considéré comme une arme de manipulation massive, que voulez-vous que les gens raisonnables disent ? Eux qui constatent avec désespoir que le moindre détail est systématiquement grossi mille fois pour devenir une affaire, qui fait baver d'envie certaines pseudo sentinelles tendances ! Et tiens, justement, à propos de bave, comment ne pas s'attrister de l'importance prise par l'image d'Alain Juppé chopée lors du débat de l'entre-deux tours... Elle le montrait avec un très léger filament liquide faisant le yoyo entre sa lèvre supérieure et sa lèvre inférieure. Oui, c'était drôle. Ou plutôt drolatique.
Mais il y a une marge entre faire un gros plan de quelques secondes et rediffuser ce passage à l'infini pour s'en repaître et faire passer le Bordelais pour un politicien déjà sénile. Avec les conséquences qu'on imagine. Je précise au passage - Dieu du ciel - que je ne passerai pas plus mes vacances avec Alain Juppé qu'il ne passerait les siennes avec moi... Mais je déteste qu'on enfonce le clou. Si on ose dire à propos de croix. Alors je n'en pense pas moins mais promis, j'en reste là. Croix de bois croix de fer.