LeTemps.ch/Agences – 02 avril 2015
Arménie et Azerbaïsjan s'accusent mutuellement d'avoir lancé les hostilités, les plus graves depuis les années 1990 autour de l'enclave. Le président russe appelle à un cessez-le-feu immédiat, et l'OSCE s'inquiète.
Au moins 12 soldats ont été tués dans des combats d'une intensité inhabituelle déclenchés dans la nuit de vendredi à samedi le long de la frontière du Nagorny-Karabakh entre forces azerbaïdjanaises et arméniennes, que le président russe Vladimir Poutine a appelées à un «cessez-le-feu immédiat»
Désinformation?
Au moins «douze soldats azerbaïdjanais ont été tués au combat et un hélicoptère abattu par les forces arméniennes», a déclaré dans un communiqué le ministère azerbaïdjanais de la Défense. «Plus de cent soldats arméniens ont été tués, six chars arméniens et quinze unités d'artillerie ont été détruits», a-t-il assuré.
«C'est de la désinformation évidente et cela n'a aucun lien avec la réalité», a répliqué dans un communiqué le ministère arménien de la Défense. Erevan avait annoncé plus tôt la mort d'un garçon de 12 ans, touché par des tirs d'artillerie azerbaïdjanais qui ont également blessé deux civils dans un village de la frontière.
Bakou a indiqué qu'un civil avait été tué du côté azerbaïdjanais.
Les forces séparatistes, soutenues par l'Arménie, ont par ailleurs affirmé avoir détruit deux hélicoptères, trois tanks et un drone, et infligé «des pertes importantes» à l'ennemi.
Des combats intenses depuis la nuit dernière
Selon Erevan, «l'Azerbaïdjan a lancé vendredi soir une attaque massive à la frontière du Nagorny-Karabakh avec chars, artillerie et hélicoptères», ce que Bakou a immédiatement démenti, assurant que ses forces n'avaient fait que répondre à une attaque du côté arménien avec «artillerie de gros calibre et lance-grenades».
Les deux côtés indiquaient que les combats se poursuivaient dans les régions séparatistes de «Khojavend-Fizuli et Agdere-Terter-Agdam», où l'Azerbaïdjan a déclaré avoir repris le contrôle de «deux collines stratégiques et un village».
A Erevan le Premier ministre Hovik Abrahamian a convoqué une réunion urgente du gouvernement face à «ces hostilités d'une échelle sans précédent de l'ennemi», se disant prêt à "prendre les mesures nécessaires pour stabiliser la situation". Vladimir Poutine veut «un cessez-le-feu immédiat»
Le président Vladimir Poutine a appelé samedi «les deux parties à un cessez-le-feu immédiat et à faire preuve de retenue pour éviter qu'il y ait de nouvelles victimes», selon le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov. Et les ministres russes des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, et de la Défense, Sergueï Choïgou, ont téléphoné à leurs homologues azerbaïdjanais et arménien pour appeler à la désescalade.
La Haute représentante de l'UE, Federica Mogherini, a de son côté «appelé à la fin immédiate des combats et au respect du cessez-le-feu».
«Dans ce conflit, il ne peut y avoir de solution militaire. Les parties doivent désormais mobiliser leur volonté politique pour reprendre les négociations dans le cadre du groupe de Minsk», a estimé dans un communiqué le ministre allemand des Affaires étrangères Frank-Walter Steinmeier, président en exercice de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). Les médiateurs internationaux du Groupe de Minsk, réunis sous l'égide de l'OSCE, ont également souligné dans un communiqué leur «vive préoccupation».
Un conflit très meurtrier dans les années 1990
Peuplé en majorité d'Arméniens mais rattaché à l'Azerbaïdjan à l'époque soviétique, le Nagorny-Karabakh a été le théâtre d'une guerre qui a fait 30.000 morts et des centaines de milliers de réfugiés, principalement des Azerbaïdjanais, entre 1988 et 1994. Malgré la signature en 1994 d'un cessez-le-feu, aucun traité de paix n'a été signé, et des accrochages armés ont régulièrement lieu le long de la ligne de démarcation, sans pour autant atteindre l'intensité observée dans la nuit de vendredi à samedi.
L'Azerbaïdjan, dont le seul budget défense est certaines années plus important que le budget entier de l'Arménie, menace périodiquement de reprendre par la force la région séparatiste si les négociations n'aboutissent pas.
L'Arménie, soutenue par la Russie qui a récemment renforcé sa base militaire dans le pays, répond qu'elle pourrait faire face à toute offensive. «Nous devons utiliser le mot +guerre+ puisqu'il n'y a plus de cessez-le-feu», a lancé fin décembre devant les journalistes le porte-parole du ministère arménien de la Défense, Artsrun Hovhannissian.