Jusqu’au 27 avril, une interpellante exposition l’éclaire à Ottignies-LLN.
Le 24 avril 1915, les autorités ottomanes arrêtaient 600 notables et intellectuels arméniens à Constantinople. Une rafle géante qui marqua le début du génocide des Arméniens. En un an, 75 % des 2 millions d’Arméniens de l’Empire ottoman étaient assassinés de manière plus ou moins systématique Nonante-sept ans après, la Turquie officielle ne l’a toujours pas reconnu officiellement et l’heure n’est pas à la réconciliation. Certes, certaines autorités turques ne nient plus la réalité des massacres mais continuent à ne pas admettre les visées réelles de leurs prédécesseurs au début du siècle dernier. Afin de commencer à jeter les germes d’une vraie reconnaissance historique et morale, il est important de mieux connaître ce génocide-là aussi. Et donc d’y sensibiliser jeunes et moins jeunes.
C’est l’objet d’une décade citoyenne qui a démarré à Ottignies-Louvain-la-Neuve avec une exposition interpellante et une série d’animations avec la participation de diverses personnalités dont l’écrivain Pierre Mertens, l’ancien recteur de l’UCL Bernard Coulie, grand expert de l’Arménie, le colonel Marchal, commandant de la mission de l’Onu au Rwanda en 1994 et bien d’autres encore. Dans ce contexte aussi, le centre d’éducation à la citoyenneté "La haine, je dis non" du Centre communautaire laïc juif présente une exposition qui remet le génocide de 1915 en perspective face aux trois autres génocides du XXe siècle : celui, encore plus méconnu de la tribu des Hereros par les Allemands en Namibie en 1904, et bien entendu la Shoah et le génocide rwandais. Son approche est résolument interactive puisqu’elle est basée sur la transmission et le dialogue entre les générations. L’objectif étant de réfléchir et d’envisager ensemble comment chacun peut participer à prévenir de tels crimes contre les hommes, aujourd’hui et demain. Quelque 28 panneaux rappellent la définition du mot "génocide" tout en retraçant l’histoire du peuple arménien et en abordant la question du négationnisme. Après leur prise du pouvoir en 1908, les Jeunes Turcs prônèrent un nationalisme radical qui prévoyait de réunir tous les Turcs du Moyen-Orient voire d’Asie mais les Arméniens constituaient un obstacle majeur à ce projet nationaliste. Et la Première Guerre n’arrangea rien
Une utile approche historique mais l’exposition vaut aussi le détour parce qu’elle évoque le vécu de survivants. Des passeurs de mémoires retracent le parcours de leur famille dans cet événement tragique et ce n’est pas un hasard si on y retrouve Antranig Zarmanian qui a eu l’idée de faire venir l’expo en Brabant wallon et qui propose du reste sur place le récit du génocide tel qu’il a été vécu par son père.
En soi, une histoire tout sauf banale : Dikran Zarmanian avait commencé à rédiger ce qu’il avait vécu de manière épisodique pendant les anées 20 avant qu’une revue arméno-américaine ne lui demande de les publier en 1953.
Après moult péripéties, son fils Antranig les a récupérées et les a traduites avec l’aide d’un proche. "Par piété filiale mais aussi par devoir de mémoire" commente ce dernier, visiblement ému de voir remonter tous ces souvenirs
Rens. : 010/45.20.61 ou info@atoutage. Le programme complet est sur www.atoutage.be
Christian Laporte
18 avril 2012