En marge du XIVe Sommet de la Francophonie tenu à Kinshasa, un pacte linguistique destiné à renforcer la place de la langue française en Arménie a été signé le 12 octobre par le Secrétaire général de la Francophonie, Abdou Diouf, et le ministre des Affaires étrangères arménien, Edward Nalbandian.

Plusieurs domaines y sont abordés. Le premier concerne la présence du français sur la scène internationale à travers la mise en œuvre de la Convention de partenariat signée ce même jour entre l’Administrateur de l’OIF et le Ministre des Affaires étrangères arménien : cet accord prévoit la mise en place de plans annuels pour le renforcement des capacités de travail en français des fonctionnaires et des diplomates arméniens spécialisés dans le suivi des dossiers européens et multilatéraux.

Un volet culture et communication prévoit également l’installation d’espaces du livre francophone (ELFE) dans certaines bibliothèques du pays et la formation de leurs responsables, ainsi que l’appui à l’émergence de médias francophones locaux…

Dans le champ éducatif, la mise en place de filières bilingues de formation professionnelle et le renforcement des relations entre les universités arméniennes et l’AUF sont envisagés.

Enfin, le Pacte s’intéresse également au domaine du Tourisme, avec la mise à disposition d’informations en français pour les voyageurs (guides, signalétique, portail d’information bilingue…).

Pour rappel, le Pacte linguistique est un instrument contractuel conclu entre la Francophonie et ses pays membres ou associés dont le français n’est pas une langue officielle. Il intervient, à la demande des États qui expriment leur volonté de renforcer la promotion de la langue française dans leurs pays. Il scelle un partenariat qui définit les apports des deux parties, l’OIF et les opérateurs de la Francophonie proposant des mesures d’accompagnement des engagements pris par les États.


I - LE PACTE LINGUISTIQUE

Genèse et contexte du Pacte linguistique arménien


L’Arménie est membre associé de l’OIF depuis 2008. Son ministre des Affaires étrangères a manifesté l’intérêt de ce pays à travailler à l’élaboration d’un pacte linguistique par une lettre adressée à M. le Secrétaire général de la Francophonie en novembre 2011.

Un document informel indiquant quelques axes et mesures potentiels en vue du futur pacte a été soumis aux autorités arméniennes, lesquelles l’ont enrichi et l’ont présenté comme base de travail pour une mission officielle exploratoire à Erevan qui a eu lieu du 18 au 23 février 2012.

Coordonnée par le représentant personnel du Président de la République d’Arménie, la mission a permis de vérifier sur le terrain la pertinence des axes et mesures identifiés pour le futur pacte et d’explorer de nouvelles pistes. Elle a conclu à une dynamique favorable au français dans ce pays.

Grandes lignes du plan d’action

Le plan d’action inscrit dans le Pacte concerne quatre domaines : éducation, culture et communication, français sur la scène internationale et tourisme.

1. Volet éducation

L’Arménie est déjà engagée, avec la coopération bilatérale française, dans un programme de renforcement du français dans l’enseignement public primaire et secondaire. L’OIF soutiendra certaines de ces actions à travers son Centre régional francophone pour l’Europe centrale et orientale (CREFECO). Elle examinera également la possibilité de mettre en place des filières bilingues de formation professionnelle dans des secteurs où le français représente une plus-value. Les relations entre les universités arméniennes et l’Agence universitaire de la Francophonie (AUF) seront renforcées. L’utilisation des outils pédagogiques de TV5 Monde sera favorisée. La coopération déjà existante avec l’AIMF dans le domaine de la construction, de la réhabilitation et de l’équipement d’écoles sera poursuivie.

2. Volet culture et communication

Des espaces du livre francophone (ELFE) seront installés par l’OIF dans certaines bibliothèques du pays dont les responsables bénéficieront de formations. Le pacte favorisera la présence francophone au Salon du livre d’Erevan. Les échanges culturels avec les pays francophones seront développés, notamment lors du « Mois de la Francophonie ». Les autorités arméniennes examineront la possibilité de l’attribution d’un canal de diffusion à TV5 Monde ainsi que la diffusion de productions francophones sous-titrées en arménien. Le Pacte aidera à l’émergence de médias francophones locaux.

3. Volet français sur la scène internationale

L’Arménie confirme dans le Pacte son engagement à respecter les dispositions du « Vade-mecum relatif à l’usage de la langue française dans les organisations internationales », consciente de la nécessité de privilégier l’expression en français et de préserver les règles du multilinguisme dans la diplomatie bilatérale et multilatérale.

Inscrite dans le plan d’action annexé au Pacte linguistique, la mise en oeuvre de la Convention de partenariat signée aujourd’hui entre l’Administrateur de l’OIF et le Ministre des Affaires étrangères arménien permettra d’intensifier les efforts dans les domaines de la diplomatie et de la fonction publique.

Sur la base d’un cofinancement des deux parties, l’accord prévoit la mise en place de plans annuels pour le renforcement des capacités de travail en français des fonctionnaires et des diplomates arméniens spécialisés dans le suivi des dossiers européens et multilatéraux. Formations au français des relations européennes et internationales, séminaires sur des thématiques internationales, ateliers axés sur l’acquisition des techniques de négociation, stages intensifs en immersion pour hauts fonctionnaires et appui à la traduction progressive du site officiel du Ministère des Affaires étrangères arménien composent ce plan de formation qui sera déployé annuellement, jusqu’en 2014, à Erevan. Des formations spécifiques seront également offertes aux jeunes diplomates stagiaires de l’Académie diplomatique.

En accompagnement de ce dispositif, les autorités arméniennes s’engagent à valoriser les compétences en langue française dans l’accès à la carrière diplomatique. La maîtrise du français est également retenue parmi les critères d’affectation des fonctionnaires et des diplomates arméniens, auxquels il sera recommandé d’appliquer et de faire appliquer les dispositions du Vade-mecum, notamment celles invitant à privilégier l’expression en langue française chaque fois que c’est possible. Enfin, les agents non francophones seront encouragés à s’engager dans une démarche d’apprentissage de la langue française, grâce à une politique de formation continue faisant la part belle à l’enseignement du français langue étrangère.

Parallèlement, le Parlement national continuera à bénéficier du programme NORIA de renforcement des capacités francophones mis en oeuvre par l’Assemblée parlementaire de la Francophonie.

4. Volet tourisme

Le gouvernement arménien, avec l’appui des partenaires, fera des efforts pour rendre les informations disponibles en français aux touristes (production de guides, signalétique, formation des professionnels du secteur et éventuelle mise en place d’un portail plurilingue d’information touristique).

II - QUELQUES DONNÉES SUR LA PLACE DU FRANÇAIS DANS LE PAYS

Nombre de francophones

En 2010, on estimait le nombre de francophones à 20 000 et le nombre de francophones partiels à 180 000 sur une population totale d’environ 3 millions d’habitants. Ceci représente respectivement 0,6% et 6 % de la population totale arménienne.

Éducation et formation

L’apprentissage du et en français est présent à tous les niveaux : de la maternelle à l’enseignement supérieur et dans l’enseignement général comme dans l’enseignement spécialisé.

En 2010, 25,4 % des élèves du primaire, 9,6% des élèves du secondaire et 16,5% des étudiants apprenaient le français comme deuxième ou troisième langue. 200 élèves suivaient les filières bilingues en français proposées par quatre établissements secondaires.

Les études professionnelles et supérieures

Inauguré en 2002, le Centre professionnel franco-arménien (CEPFA) propose des formations professionnelles de deux ans comprenant toutes l’apprentissage du français.

Le français est enseigné dans tous les établissements d’enseignement supérieur, où il est proposé au choix avec l’anglais, l’allemand et parfois l’espagnol. L’Université française d’Arménie (UFAR), la seule université dont la langue véhiculaire est le français, accueille environ 700 étudiants qui peuvent désormais obtenir simultanément des diplômes d’État arméniens et français Il existe aussi des établissements d’enseignement supérieur spécialisés dans l’étude approfondie de la langue comportant des filières francophones (Université linguistique d’État Brioussov d’Érevan).

Les médias

Grâce à une politique de soutien aux nouvelles technologies, le câble et Internet se sont considérablement développés, ce qui a eu des effets positifs pour le français. Plusieurs chaînes télévisées francophones sont accessibles au public arménien : TV5Monde, Arte, France 2, TF1 et Canal+…

RFI émet une partie de ses programmes en français dans la région d’Erevan. Le système public de radio comprend 2 chaînes qui émettent en 14 langues dont le français. La télévision publique d’Arménie rassemble 3 chaînes dont une chaîne culturelle qui émet une émission d’apprentissage du français. L’Agence de presse Noyan Tapan fournit des actualités en français sur son site Internet, mais fait également paraître un hebdomadaire avec des journalistes écrivant directement en français, et sa version électronique est également disponible sur Internet. Plusieurs titres sont publiés en France par la communauté arménienne.

12 octobre 2012

Organisation internationale de la Francophonie