La Syrie, un des plus anciens pays au monde, risque l’anéantissement. Avec en toile de fond le spectre de la catastrophe irakienne, la population vit dans l’angoisse. Pour le représentant du Saint-Siège à Damas, le pays est au bord de l’abîme. Sur notre antenne, Mgr Mario Zenari a invité la communauté internationale à la sagesse et à la prudence. Il faut certes empêcher d’autres atrocités – souligne-t-il - mais il faut aussi prendre garde à ne pas compliquer ultérieurement la situation.

Mgr Antoine Audo, éveque chaldéen d’Alep, est allé dans ce sens dans une interview à Radio Vatican. Selon lui, une intervention militaire voudrait dire « une guerre mondiale ». « Toute la Syrie est maintenant en guerre, ajoute Mgr Audo, et ce que nous attendons est une force internationale qui aide à dialoguer et non à faire la guerre ».

La difficile situation des chrétiens d'Orient

En Syrie, il n’y a plus ni travail, ni nourriture. Les conséquences de la guerre sont catastrophiques – affirme Mgr Samir Nassar, l’archevêque maronite de Damas. Dans ce contexte terrifiant, les chrétiens, qui bénéficiaient de la liberté religieuse, se sentent aujourd’hui très seuls. Leurs communautés manquent de moyens.

En France, l’Œuvre d’Orient appelle à une aide concrète pour répondre à leur drame. Dans un communiqué publié le 22 août, Mgr Pascal Gollnisch, directeur général de cette organisation catholique, déplore de graves pénuries d’alimentation à l’intérieur du pays, mais aussi la situation inquiétante des chrétiens réfugiés dans les pays frontaliers. Au Liban, en Jordanie et en Turquie, les chrétiens ne se sentent pas bienvenus dans les camps et préfèrent se réfugier dans les paroisses, les écoles, les monastères, les jardins. « La Syrie brûle ! Son économie s’effondre ! » – écrit-il. Mgr Gollnisch appelle à aider financièrement les communautés religieuses sur place, dans leur service auprès des populations. Car ce sont les églises locales, catholiques, protestantes ou orthodoxes qui distribuent à tous, chrétiens et musulmans, les produits de première nécessité.

Une pauvreté et une inflation galopantes

Il y a trois ans, la Syrie avait un taux de croissance économique de plus de 8%. Selon Mgr Benham Hindo, archevêque d’Hassaké, les ¾ des familles “moyennes“ sont passées sous le seuil de la pauvreté et les prix ont été multipliés par dix. Depuis trois mois il n’y a plus de lait pour les bébés. Dans certains quartiers de Homs, les gens vont bientôt s’entretuer pour de la nourriture. Faute de soutien, les Maristes bleus d’Alep, comme tant d’autres, risquent de devoir arrêter leur distribution.

A cela s’ajoute l’hostilité des islamistes : récemment, une église orthodoxe a été saccagée et pillée par les rebelles. Les Bibles, les croix, les icônes ont été détruites. Depuis le début du conflit, des responsables des Eglises orientales chrétiennes critiquent farouchement les chancelleries occidentales et les « omissions » de la presse étrangère qui, selon eux, ne dit pas toute la vérité.

Quelle attitude pour les puissances occidentales ?

On connaît les intérêts américains dans la région – note pour sa part Marc Fromager, de la Fondation Aide à l’Eglise en détresse. Mais la France ? De par ses liens historiques avec la Syrie et les chrétiens d’Orient, elle a une double responsabilité. Or, estime-t-il, sa politique étrangère sur le dossier syrien suscite des interrogations compte tenu de la porosité de la rébellion syrienne avec les milieux islamistes liés à Al-Qaïda. Et après la Syrie, comment ne pas déjà entrevoir la dislocation du Liban ? Là aussi, est-ce la disparition des chrétiens que l’on cherche ? Marc Fromager s’interroge jusqu’à affirmer que ce chaos a été instauré, alimenté et financé en grande partie depuis l’étranger et que cela relève purement et simplement du crime.

Enfin, à Moscou, le Patriarche orthodoxe Cyrille Ier a estimé que la tragédie qui frappe la Syrie risque de provoquer la disparition des chrétiens, une tendance qui, selon lui, se propagera aux pays voisins. Les chefs des églises orthodoxes ont signé une déclaration demandant qu’on empêche la disparition des chrétiens au Proche-Orient.

26 août 2013

Radio Vatican