Conflits et transitions politiques chaotiques rendent vulnérables ces minorités, comme en Égypte où les islamistes s'en sont pris à la communauté copte.Plus de 500 filles et jeunes femmes chrétiennes ont disparu ces deux dernières années. Enlevées par des islamistes radicaux, elles sont converties et mariées de force.

De Bagdad au Caire en passant par Damas, l'avenir des chrétiens d'Orient rime souvent avec émigration ou persécutions. «Nous sommes d'authentiques Égyptiens et pas des étrangers dans notre propre pays comme beaucoup d'islamistes le prétendent», martèle le patriarche copte catholique Mgr Ibrahim Sidrak, de passage à Paris. Élu il y a six mois à la tête de cette minorité au sein de la minorité copte d'Égypte - 250.000 catholiques sur 7 millions d'orthodoxes, mêlés à 80 millions de musulmans - Mgr Sidrak ne cache pas son soulagement après le renversement cet été par l'armée du président Mohammed Morsi lié aux Frères musulmans. Un tournant dans les révolutions arabes qui a rassuré d'autres minorités chrétiennes du Moyen-Orient, en particulier les chrétiens syriens, inquiets du chaos islamiste qui régnerait en cas de chute brutale du régime.

Quelques signaux rassurants

En Égypte, entre le 14 août et le 10 septembre, quelque 70 lieux chrétiens - églises, couvent ou écoles - ont été incendiés ou saccagés par des islamistes. Une trentaine d'autres biens - maisons ou commerces - appartenant à des chrétiens ont aussi été attaqués. Le problème, «c'est que dans un pays en pleine recomposition, n'importe qui peut prêcher la haine d'un minaret», explique Mgr Sidrak.

Et derrière les Frères musulmans, les salafistes - deuxième force islamiste d'Égypte - ne s'en priveraient pas. «Ce ne sont pas eux qui attaquent nos églises, précise Mgr Sidrak, mais les partisans du groupe radical Djamaa islamya. Reste que les salafistes attisent la haine dans les mosquées et que ces différents groupes se rejoignent souvent sur le terrain.»

Les coptes espèrent beaucoup des nouvelles autorités égyptiennes, qui ont promis protection et aide à la reconstruction. «Le pouvoir nous envoie des signaux rassurants, en insistant sur l'indispensable participation des chrétiens à l'avenir de l'Égypte. Nous espérons que cela va continuer», avance avec prudence Mgr Sidrak.

«Sous Morsi, nous avons vu le contenu des livres scolaires changer la mentalité des enfants, observe-t-il. Auparavant, l'ignorance était à l'origine de la plupart des actions contre nos fidèles. Avec Morsi, nous avons senti qu'il y avait une volonté de nous nuire.» En attestent les débats sur la place des «autres religions», en clair les juifs et les chrétiens, dans la rédaction de la Constitution post-Moubarak. En cherchant à singulariser les chrétiens, «les Frères musulmans s'en prenaient en fait à l'identité même de l'Égypte», poursuit le dignitaire copte.

Faut-il alors se réjouir de les voir interdits par le nouveau pouvoir issu de l'armée? «Je suis contre le fait d'interdire à un parti d'exister. Mais ce n'est pas tout à fait une interdiction qui relève de l'arbitraire puisqu'elle résulte au contraire d'une décision de justice», argumente-t-il, un peu gêné. «Nous souhaitons que les sympathisants des Frères musulmans soient intégrés dans un processus de réconciliation, mais pas ceux qui ont utilisé les armes», prévient l'évêque copte, tout en reconnaissant qu'en l'état actuel des choses une telle «réconciliation sera difficile».

Georges Malbrunot

25 septembre 2013

Le Figaro