Parlant de la lutte du peuple arménien pour la justice, il a dit que « de nombreuses études, des publications, des conférences, des séminaires, étayés par des preuves historiques et des récits de témoins oculaires, ont pendant des décennies formé l’articulation concrète de la lutte du peuple arménien pour la reconnaissance du génocide arménien. Les contacts avec les milieux politiques et la collaboration avec les acteurs de la société civile ont contribué à plus de sensibilisation en ce qui concerne le génocide arménien. Ce premier génocide du 20ème siècle est devenu aujourd’hui une partie intégrante de l’agenda international ».
Se référant aux nouvelles réalités, Aram Ier a rappelé que « la question du génocide arménien acquiert une nouvelle forme et expression, elle suscite un regain d’intérêt et une nouvelle réaction. Ces facteurs et les développements mentionnés, brièvement, avec leurs implications doivent être prises sérieusement en considération afin que nous essayons de réévaluer et de réactiver nos efforts. Cependant, nous devons être réalistes. Nous devons garder à l’esprit que l’activisme pourrait bientôt atteindre une impasse s’il n’est pas compatible avec les réalités géopolitiques et les intérêts du monde actuel, la recherche scientifique sera confinée aux cercles académiques si elle n’est pas testée par le droit international et la loi internationale sera inapplicable si elle n’est pas soutenue par une volonté politique ».
Sa Sainteté a souligné la nécessité d’une « nouvelle stratégie, un nouveau point d’entrée et un nouvel accent pour éviter la stagnation et se lancer dans un nouveau processus ». Il a dit que « nous avons passé beaucoup de temps, d’énergie et de capital sur le militantisme et la recherche historique. Sans remettre en cause l’importance vitale de ces efforts, il est temps que nous nous concentrions notre attention sur la réparation. La Conférence d’Antélias, organisée par le Catholicos arménien de Cilicie, était précisément une étape concrète en ce sens. Elle a défini ces dispositions et les points d’entrée que le droit international peut prévoir dans le sens de la réparation. Dans le même temps, il a souligné les limites, les ambiguïtés et les incertitudes dans le droit international en vigueur ».
Selon le Catholicos Aram I, « accepter la vérité et l’indemnisation des victimes du génocide dans le cadre d’un processus de guérison et de réconciliation ne sont pas des questions purement juridiques relatives aux mécanismes et procédures juridiques, elles représentent un impératif moral qui est au cœur des droits de l’homme, et en tant que tel doivent être reconnues, respectées et mises en œuvre par les nations et les États en toutes circonstances. Si notre approche est conditionnée exclusivement par des considérations géopolitiques, si nos critères dans la lutte contre ces questions sont strictement déterminés par le droit international, alors les valeurs éthiques et les normes morales, ainsi que les principes fondamentaux des droits de l’homme seront absents des relations internationales. Certains pourraient dire que c’est déjà le cas ... ».
S’exprimant sur les biens de l’Eglise arménienne, Sa Sainteté a rappelé qu’ils « ne peuvent pas être considérés comme « abandonnés » parce que les Arméniens n’ont pas quitté leurs propriétés par leur propre choix, ils ont été menacés et forcés de les quitter. Par conséquent, les propriétés arméniennes ont été saisies par la force et confisquées par l’État. La confiscation des biens en toutes circonstances est non seulement illégale, mais c’est aussi un crime contre l’humanité. Le peuple arménien est le propriétaire légitime de ses propriétés ».
En conclusion de son allocution, Aram 1er a dit « Notre demande est légitime. On ne peut ignorer ses dimensions morales, éthiques et religieuses et les implications. La Turquie doit faire preuve de courage pour accepter la vérité, si elle est vraiment attachée aux droits de l’homme, si elle croit en la coexistence harmonieuse, au dialogue constructif et à la collaboration étroite entre les nations, les Etats et les religions, il faut faire un pas concret dans le sens d’une réparation par un retour des églises à leurs propriétaires légitimes, le peuple arménien. Il est, en effet, grand temps pour la Turquie d’agir au lieu de réagir, en changeant sa politique de négation, le négationnisme et l’obstruction de celle-ci à se réconcilier avec son passé ».
Les principaux orateurs de la conférence étaient : Charles Tannock, Fausto Pocar, Henry Theriault, Caroline Fournet, Ragib Zarakolu, Theophanis Malkidis, Otto Luchterhandt. La conférence a été suivie par un certain nombre de spécialistes du génocide et du droit international ainsi que des représentants du Parlement européen.
18 octobre 2013