Le Conseil Œcuménique des Églises (CŒE) a fait part de sa “ grande préoccupation “, à la suite du jugement de la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH), dans l’affaire Perincek c. Suisse, rappelant que le Conseil National Suisse et le Tribunal Fédéral avaient clairement reconnu le Génocide arménien comme un fait historique.
L’arrêt de la CEDH de décembre 2013 a statué en faveur de l’homme politique turc Dogu Perincek dans un procès intenté à la Suisse. Perincek est connu pour avoir nié de façon réitérée le Génocide arménien et avoir été condamné par un tribunal suisse en 2008. La Suisse a le droit de faire appel contre le jugement de la CEDH.
Dans une lettre officielle envoyée au Département Fédéral de la Justice et Police le 27 février, le Pasteur Dr Olav Fykse Tveit, secrétaire général du CŒE, demande avec insistance au “ gouvernement suisse de faire usage de son droit de faire appel du jugement de la CEDH, qui constitue un affront à la mémoire des victimes du Génocide arménien et à leurs descendants “.
Selon le Pasteur Tveit, il s’agit d’une question d’ “ importance éthique et sociale “ qui rappelle le devoir de “ travailler ensemble à l’élimination de la discrimination et des préjugés et à la prévention du génocide et des crimes contre l’humanité “.
Par le passé, le CŒE a insisté sur la nécessité de reconnaître publiquement le Génocide arménien, en particulier par la publication en 1984 d’un document titré Arménie : une tragédie qui continue. Ce document a contribué à faire connaître l’histoire et le désarroi du peuple arménien.
La Commission des Églises sur les Affaires Internationales du CŒE a également soulevé la question du Génocide arménien devant la Commission des Droits de l’Homme des Nations Unies.
Un rapport adopté à la 6ème Assemblée du CŒE à Vancouver en 1983 relevait la nécessité de se rappeler l’impact du Génocide arménien.
“ Le silence de la communauté du monde et les efforts délibérés de nier même les faits historiques ont été des sources constantes de douleur et de désarroi pour le peuple arménien, les églises arméniennes et beaucoup d’autres “, déclarait le rapport.
Texte de la lettre du Secrétaire Général du CŒE
Le Secrétaire Général du CŒE Pasteur Dr Olav Fykse Tveit
à
La Conseillère Fédérale Simonetta Sommaruga Département Fédéral de Justice et Police Berne, Suisse
26 février 2014,
Chère Conseillère Fédérale Sommaruga,
J’ai l’honneur de vous saluer au nom du Conseil Œcuménique des Églises. C’est avec une grande inquiétude que nous avons été informés du jugement dans l’affaire Perincek c. Suisse, rendu le 13 décembre 2013. Nous savons qu’à la fois le Conseil National Suisse (2003) et le Tribunal Fédéral, en deux occasions (2007 et 2010), ont clairement reconnu le Génocide arménien comme un fait historique.
Le CŒE a abordé la nécessité de reconnaître publiquement le Génocide Arménien, en 1984, en particulier par la publication d’un document titré Arménie : une tragédie qui continue. Le document a contribué à faire connaître l’histoire et la détresse du peuple arménien. La Commission des Églises sur les Affaires Internationales du CŒE a également soulevé la question du Génocide arménien devant la Commission des Droits de l’Homme des Nations Unies, se référant à son récent “ Rapport Révisé et Mis à Jour que la Question de la Prévention et de la Répression du Crime de Génocide “.
Le CŒE est d’avis que dans une perspective chrétienne, la route vers la justice et la réconciliation impose la reconnaissance du crime commis comme condition sine qua non pour la guérisons des mémoires et la possibilité d’un pardon. Le Pardonner n’est pas oublier mais regarder le passé avec l’intention de rétablir la justice, le respect des droits humains et des relations entre les auteurs et les victimes.
Le 24 avril 2015, nous commémorerons le 100ème anniversaire du Génocide Arménien. Nous demandons par conséquent avec insistance au Gouvernement suisse qu’il fasse usage de son droit de faire appel du jugement de la CEDH, qui constitue un affront à la mémoire des victimes du Génocide arménien et à leurs descendants. C’est une question dont la signification éthique et sociale, très importante, nous rappelle que nous devons, tous ensemble, travailler à l’élimination de la discrimination et des préjugés et à la prévention du génocide et des crimes contre l’humanité, pour le bénéfice des générations futures.
Salutations.
Pasteur Dr Olav Fykse Tveit Secrétaire général du CŒE
Traduction de Gilbert Béguian