Le Comité de Vigilance Citoyen réagit à la publication du deuxième ouvrage négationniste du conseiller communal schaerbeekois (MR) Mustafa Ozturk.
Un conseiller communal MR de Schaerbeek publie un ouvrage niant le génocide des Arméniens pourtant reconnu par la Belgique. En juin dernier, un journal turc reprenait les propos d'une candidate et maintenant députée bruxelloise cdH. Un ministre bruxellois PS a perdu un procès l'opposant à un journaliste indépendant l'accusant de propos négationnistes (dans le contexte du génocide des Arméniens). Le PS et le cdH ont bloqué une proposition de loi lancée par le MR et ECOLO pour pénaliser la négation de ce génocide.
"Trop is te veel ... " Il est temps que les partis politiques fassent le ménage dans leurs rangs et obligent les défenseurs des génocidaires de 1915 à se démettre ou à se soumettre. La négation du génocide des Arméniens doit être pénalisée. La mémoire d'un million cinq cents mille victimes civiles arméniennes et chrétiennes, femmes, enfants, vieillards par les séides de l'Empire Ottoman vaut plus que les quelques centaines de voix communautaires collectées grâce à la défense de la ligne politique d'Ankara. Ces voix ont le goût du sang ... C'est pourquoi CVC demande des comptes à Mustapha Öztürk, conseiller communal MR à Schaerbeek avant, le cas échéant, de signaler les propos de ce mandataire au Centre d'Egalité des Chances et de la Lutte contre le Racisme.
Le Président du Mouvement Réformateur a également été saisi par nos soins du cas Özturk. Nous attendons toujours sa réaction depuis le 01 septembre.
A propos du Centre d’Egalité des Chances et de la Lutte contre le Racisme, suite à notre signalement de juin à l’encontre de la députée Ozdemir Mahinur et subsidiairement Joëlle Milquet, le centre nous as informé que ce dossier était « d’ordre politique », pourtant une décision cadre de l’union européenne impose à la Belgique d’étendre sa loi sur le négationnisme. Rien n’interdit au CECLR de jouer son rôle de prescripteur, de condamner moralement les négationnistes et de conseiller vivement au parlement de modifier cette loi lacunaire rapidement.
LETTRE OUVERTE A MONSIEUR MUSTAFA ÖZTÜRK, CONSEILLER COMMUNAL DU MOUVEMENT REFORMATEUR A SCHAERBEEK
Monsieur Öztürk,
Vous êtes conseiller communal à Schaerbeek sous l’étiquette du Mouvement Réformateur, élu en 2000 (581 voix) et 2006 (558 voix) et vous venez de publier aux éditions turques Bilge Karinca Yayinlari un ouvrage intitulé « 1915 avec les documents – La question arménienne ». Votre intention avouée est de défendre la version du gouvernement d’Ankara selon laquelle le génocide des Arméniens n’est vérifié par aucune source historique. Il s’agit donc et sans doute possible, d’un ouvrage niant la réalité historique de l’assassinat organisé et planifié de plus d’un million et demi d’Arméniens, hommes, femmes et enfants en 1915 par et sur ordre de l’Empire Ottoman aux abois.
L’interview que vous avez donnée dans un but promotionnel ce 27 août 2009 à Gündem, journal turcophone est claire quant à vos intentions « Sözde soykırım tasarısı konusunda her Türk vatandaşı gibi bizlerde rahatsızız. « Chaque citoyen turc est mal à l’aise vis-à-vis du projet de loi relatif au soi-disant génocide des Arméniens. Vous ajoutez avoir écrit un livre de recherche sur ce sujet en français (NDT : Le pouvoir du Lobbi (sic) Les Massacres Perpétrés Par les Arméniens En Asie Mineure, Chypre Et En Azerbaidjan -2005), ajoutant que cette étude est le fruit d'années de documentation méticuleuse, de témoignages de centaines de personnes démontant les fausses allégations sur le génocide des Arméniens.
Vous ajoutez avoir été soutenu par le président du MR de l’époque, Monsieur Daniel Ducarme. Il appréciera.
Pour vous, « Le prétendu génocide arménien est le sujet qui fâche le plus les Turcs. Et en tant que Turcs vivant en Belgique (NDR : vous avez la double nationalité), on ne peut rester indifférent face à cela. Aucun Turc au monde ne peut accepter que la négation du génocide soit punissable, qu’on enseigne dans les écoles que ‘Les Turcs ont perpétré un génocide’. Une telle acceptation équivaudrait à ce que nos enfants soient qualifiés d’enfants de bourreaux » (source : parlemento.com).
Le 30 mai 2005, vous avez adressé un courrier à votre président de parti, Monsieur Reynders pour manifester les inquiétudes de la communauté turque de Belgique suite au dépôt par Monsieur Maingain d’une proposition d'amendement à la loi du 23 mars 1995 relative au génocide des Arméniens de Turquie en 1915. De votre siège scabinal, vous mettez en garde Monsieur Reynders contre l’effet électoral négatif qu’aurait sur la communauté turque dans son ensemble et sur les relations politiques et économiques entre la Turquie et la Belgique.
Vous vous êtes déjà fait remarquer par le parti en 2005 par votre position négationniste :« On ne peut pas tenir de tels propos et rester membre du MR »...
Le sénateur MR François Roelants exige des sanctions après les déclarations de l'élu communal MR Mustafa Öztürk, dans le cadre de la conférence de Yusuf Halacoglu « sur le prétendu génocide arménien » (Le Soir de jeudi et vendredi).
Le Président du MR, Didier Reynders avait saisi le Conseil d'arbitrage du parti, en juin 2005 : « Je ne peux imaginer que des militants ou des mandataires tiennent des propos ou diffusent des écrits qui soient clairement négationnistes ».
Des élus du CDH (Halis Kökten et Mahinur Özdemir) et une échevine PS (Hava Ardiçlik) participaient également à la conférence négationniste. Sans réaction officielle, ni au CDH ni au PS.
En tant qu’ « historien », bien que votre démarche ne respecte pas les critères des études du genre, vous ne pouviez ignorer la position du Mouvement Réformateur. Le centre Jean Gol met à votre disposition une étude exhaustive du sujet sous le titre Le « Génocide Arménien » et reprend la synthèse faite par Winston Chruchill : En 1915, le gouvernement turc commença et mena à bonne fin sans ménagements une oeuvre infamante, le massacre et la déportation générale des Arméniens d’Asie Mineure… La suppression de ce peuple sur la carte de l’Asie Mineure fut à peu près aussi complète qu’elle pouvait l’être à une aussi grande échelle… Il ne fait aucun doute que ce crime fut planifié et exécuté pour des raisons politiques. Une chance se présentait de purifier le sol turc d’un peuple chrétien opposé à toutes les ambitions turques, nourrissant lui-même des ambitions nationales qui ne pouvaient être satisfaites qu’aux détriments de la Turquie, et planté géographiquement entre la Turquie et les musulmans du Caucase. (CHURCHILL, W., The World Crisis : The Aftermath, Londres, 1929, p.405.).
Sur le site du Mouvement Réformateur, son président, Didier Reynders déclare : "Il faut reconnaître que nous avons tous, dans nos formations politiques respectives, des personnes qui posent problème par leur attitude à l'égard des Arméniens. Pour ma part, je saisis le Conseil d'arbitrage du MR. Je ne peux pas imaginer que des militants ou des mandataires tiennent des propos ou diffusent des écrits qui soient clairement négationnistes. Et je n'ai pas besoin du droit pénal, en tant que président, pour faire le ménage. Car il n’est pas acceptable que des élus n'hésitent plus à remettre en cause le génocide arménien. D'abord, il ne peut pas y avoir de doute, en Belgique, sur l'existence de ce génocide (…) » (source : 14 juin 2005)
Lors d’une interview à un site pro-turc, vous avez minimisé le nombre de victimes du massacre des Arméniens par les Ottomans lesquels, assurez-vous, n’ont fait que se défendre (contre des femmes, des enfants, des vieillards ?). « Dans mon livre (NDR : Le pouvoir du lobbi (sic), je prouve les massacres perpétrés par les Arméniens sur les Turcs en citant même des chiffres. 518 105 victimes turques tuées par les Arméniens. Il y a eu aussi 200 à 300 000 Arméniens qui ont été, je ne dis pas tués, mais morts lors des déportations, par les brigades kurdes... Les Arméniens ont été tués aussi bien par les Turcs que par les Kurdes et même par d’autres Arméniens. Les décès ont eu lieu pendant la déportation durant l’hiver, lors d’une marche de 600 km parcourus à pied avec des attaques de brigands turcs, kurdes et arméniens, des causes de maladie ou de faim aussi".(…) Il n’y a pas eu de génocide arménien mais des massacres des deux côtés. C’est une grave erreur de parler de génocide. Pour qu’il y ait génocide, vous devez organiser les choses. A cette époque, on ne voit pas une organisation de la part des Turcs alors que les Arméniens s’organisent en achetant des armes." (source : Les Amis de la Turquie, 8 avril 2005).
Dans vos propos, aucune compassion pour les victimes, aucune empathie pour la douleur de leurs descendants.
La thèse que vous défendez est celle de l’Etat turc :"En Turquie, la négation de l'existence du génocide arménien constitue une vision inattaquable de l'histoire, la position officielle de tous les gouvernements turcs successifs et de l'ensemble de la classe politique. La Turquie actuelle établit une distinction claire entre les massacres qui ont affecté la population arménienne - qu'elle reconnaît - et la qualification de génocide. Elle n'accepte qu'une définition juridique étroite de ce concept qui suppose selon elle, une volonté délibérée d'un État de détruire une population pour des raisons ethniques ou religieuses. Au delà du débat sur les chiffres, la réalité des massacres de populations arméniennes n'est pas niée (300.000 à 500.000 morts), mais la Turquie actuelle considère qu'il n'existe aucune preuve du caractère organisé ou commandité par l'État central des massacres. Ceux-ci sont imputés à la désorganisation générale, au contexte local et à l'exacerbation des passions entre les populations civiles arméniennes et turques. Selon elle, la dénomination génocide est d'autant moins crédible qu'elle est la négation des valeurs d'un Empire où ont cohabité jusqu'au XlXème siècle, sans heurts majeurs, peuples et religions divers. » (Rapport du député français René Rouquet au nom de la commission des affaires étrangères de l'assemblée nationale française, Document n° 925, onzième législature, 26 mai 1998, en préliminaire à l'adoption, le 28 mai 1998, à l'unanimité, par l'assemblée nationale et, ultérieurement, le 7 novembre 2000, par le Sénat français, de la loi disposant que "La France reconnaît publiquement le génocide arménien de 1915").
Vous ne voulez pas accepter que « la réalité du génocide arménien a déjà été établie par de nombreux travaux d'historiens de tous bords et a été reconnue par de nombreux parlements et institutions internationales: il en est ainsi, notamment, du Tribunal permanent des peuples (en avril 1984, après une analyse historique précise et documentée de monsieur Yves Ternon, historien français), du Parlement français (en mai 1998 et en novembre 2000), du Parlement européen (en juin 1987, sur proposition du groupe socialiste et après un rapport de monsieur Vandemeulebroecke), de l'assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (en avril 1998, déclaration de 51 signataires), du Sénat de Belgique (en mars 1998, sur la proposition de tous les partis démocratiques). Il convient en outre de signaler que le génocide arménien a été reconnu par la Sous-commission de la lutte contre les mesures discriminatoires et pour la protection des minorités de l'Organisation des Nations Unies (ONU), qui dépend de la Commission des droits de l'homme rattachée au Conseil économique et social de l'ONU. Cette reconnaissance a eu lieu le 29 août 1985, après un premier rapport intermédiaire du Rwandais Nicodème Ruhaskyankiko et le rapport final du rapporteur spécial, le Britannique Benjamin Whitaker, se fondant tous deux notamment sur les travaux de l'historien britannique Arnold Toynbee ».
Il ressort de ces reconnaissances que le génocide arménien est reconnu non seulement par votre parti, mais également par des institutions nationales et internationales parmi les plus hautes, qui se sont fondées sur des études d'historiens et des rapports scientifiques et objectifs, émanant de sources très diverses. (source : TRIBUNAL DE PREMIERE INSTANCE DE BRUXELLES 279/14/05 14ème Chambre Affaire Emir Kir contre MM. KOKSAL et LAMBERT). Monsieur le Conseiller communal, ces références multiples ne doivent pas vous être inconnues. Monsieur Willy Fautré, directeur de Human Rights Without Frontiers (que l’on ne peut qualifier d’appartenance au lobby arménien que vous fustigez) proposait la recommandation suivante le 26 mars 2007 lors d’une conférence donnée au Parlement Européen : « to the Belgian elected people of Turkish descent : to have one and sole allegiance: the Belgian state ».
Monsieur Öztürk, permettez-nous une question : Qu’est-ce qui a le plus de valeur dans votre engagement politique : la Constitution belge et la position du Sénat belge ou la Constitution turque et la position d’Ankara en matière de reconnaissance de ce génocide ? Nous espérons une réponse claire de votre part.
En attendant, vous persistez et signez un nouvel « ouvrage » niant ce génocide, suivant en cela la politique d’une puissance étrangère, ce qui pose un problème dans notre système démocratique belge. Vous vous mettez ainsi au devant de l’actualité et il ne faudra vous en prendre qu’à vous-même. En tant que conseiller communal belge, vous ne représentez pas la ligne politique d’Ankara, Schaerbeek N’est PAS un Emirdag bis et vous vous mettez vous-même, de par vos propos nationalistes « hors-la-loi » par rapport à votre propre parti, mais aussi par rapport à la Constitution belge.
Monsieur Mustafa Öztürk, il vous reste à en tirer les conclusions : soit des excuses faites aux descendants des victimes du génocide de 1915, soit la démission. Cela porte un nom : le courage politique. Une attitude contraire reviendrait à tromper l’électeur.
PS : Nous constatons que vous êtes absent de la liste de déclaration de mandats parue au Moniteur le 14 août 2009 (entre autres : Conseiller communal, administrateur de Sibelga, IBG et IBE). Erreur de notre part ? du Moniteur ? de la Cour des Comptes ? (Ndr : D'autres comme Ozdemir Mahinur sont dans le même cas).