Nicolas Tavitian Président du CAB - 01/04/2021
Ce numéro sort le 1er avril. Dans quelques jours, nous célébrerons Pâques, la résurrection et le retour des beaux jours ! Après sept mois éprouvants, en Belgique et plus encore en Arménie et en Artsakh, n’est-ce pas le moment de retrouver espoir et vigueur ?
Ce 24 avril, nous commémorerons encore le Génocide des Arméniens. La commémoration se fera en ligne et sera dédiée aussi aux victimes de la guerre de 2020 en Artsakh. Plus de 4000 jeunes hommes sont tombés victimes de la guerre cette année en Artsakh. Leur sacrifice a permis de sauver des milliers de vies civiles. Nous leur rendrons tout naturellement hommage, sans oublier les près de 200 autres soldats encore retenus dans les prisons azerbaïdjanaises au mépris des accords conclus et du droit international.
Ce mois-ci se déroulera également un projet sans précédent en Belgique : le Sondage de la diaspora arménienne (de son nom anglais : « Armenian Diaspora Survey ») permettra à tous les Arméniens du pays de se faire mieux connaître. Réalisée par la Fondation Gülbenkian et l’Armenian Institute de Londres, cette enquête permettra aux acteurs communautaires de baser leurs actions futures sur les véritables aspirations de la population arménienne du pays. Et elle nous permettra de faire connaître ces aspirations au public belge et aux autorités de ce pays. COVID 19 oblige, le questionnaire sera accessible en ligne uniquement. Nous encourageons donc tous les lecteurs du Hay à nous aider à le diffuser à partir du 12 avril, date du lancement de l’enquête.
Cette étude est l’un des projets annoncés récemment dans le programme de travail de la Communauté. Elle est loin d’être le seul : tous ces projets ont en commun qu’ils visent à contribuer à construire une communauté plus, forte, plus créative, qui cultive l’art de la coopération.
Les Arméniens n’ont jamais été unis. Dispersés de par le monde, ils cultivent leurs particularités. Songeons aux clivages entre appartenances politiques qui ont longtemps structuré la diaspora (Dashnaks, Ramgavars et Hentchaks), aux origines géographiques diverses, à l’opposition entre arménien occidental et oriental, entre ancienne et nouvelle diaspora … Sans oublier notre tout nouveau clivage, les pro- et les anti-Pachinyan. Le bilan du premier ministre de ’Arménie pendant la guerre est controversé, et le débat ira en s’échauffant au fur et à mesure que l’on approchera de la date des élections en Arménie, le 20 juin prochain.
Cette diversité et ces clivages sont notre constitution et notre richesse. L’unité de la communauté n’a pas de sens si elle se fait à leurs dépens. Toutes les initiatives sont source de richesse et notre intérêt à tous est d’apprendre de l’expérience des autres et de découvrir ensemble ce que nous pouvons réaliser de plus créatif, de plus audacieux, de plus utile.
Mais n’oublions pas qu’il existe des forces, bien réelles, qui voudraient nous voir nous épuiser dans des querelles et dans nos divisions. Souvenons-nous que notre premier devoir est d’encourager et de valoriser ceux qui, en Belgique, se consacrent à une cause commune, même si nous ne partageons pas toutes leurs idées. Il nous faut cultiver l’art de l’action et de la coopération et chercher dans chaque discussion les points communs sur lesquels nous pouvons construire. Et s’il faut s’appesantir sur les désaccords, que ce soit pour les explorer et les comprendre, et non pour identifier un adversaire.
Au 21ème siècle, en Belgique, notre existence ne dépendra pas de notre allégeance à un chef, ni de notre discipline de parti, ni d’une unité factice, mais de notre capacité à réconcilier coopération et différence. « La seule chose qui sauvera l’humanité est la coopération », disait le philosophe Bertrand Russel. Il pensais sans doute aux Arméniens.
Nicolas Tavitian,
Président du Comité des Arméniens de Belgique